Monoï, clefs, radios et coup de stress
Que faire lorsque c'est lundi, que c'est férié, qu'il fait
30°C, qu'on a fait le ménage de l'appart à fond (et qu'on est à jour même dans
ses lessives), qu'on habite un petit appartement où il fait 45°C ? Quand on
s'appelle Barblala comme moi, on prépare son "kit de survie" avec
huile de monoï, roman du moment, "Glamour "du moment, cours du CNED
pour se donner bonne conscience, lunettes de soleil, et on plie bagages
direction "sa soeur" et son délicieux jardinet de paradis.
Me voici donc parée, prête à filer droit rejoindre les joies de la campagne.
Arrivée à la voiture, je réalise que je n'ai pas pris le sac de vêtements que
je dois donner à ma soeur. Car ce matin, j'ai trié ma garde-robe d'été et
sélectionné 2-3 bricoles que je n'ai plus envie de mettre (raison
officielle)... ou qui ne me vont plus trop (raison réelle : oui, je sais, je
dois avoir les pores particulièrement dilatées en ce moment, surtout celles des
cuisses, et les os lourds aussi...).
Je ne sais pas pourquoi, quelque chose me dit que je dois remonter à l'appart
chercher ce sac de vêtements, même si ma soeur n'attend pas après, en colle
roulé et moon-boots. Je remonte, je glisse ma clef dans la serrure et là,... ça
bloque. Impossible de la tourner ! Horreur malheur : ça ne fait qu'un tour, je
comprends j’ai laissé le double de la clef de l'autre côté !
Pas le choix, il faut la débloquer maintenant, et pas ce soir à 22h45. Pas
question non plus de faire appel à un serrurier qui se ferait, un jour de
pentecôte, un plaisir de me demander
150 € pour avoir faire un trou dans la porte.
Me voilà donc à la recherche d'un moyen pour ouvrir cette fichue porte. En
faisant des aller-retour avec la clef, l'autre va bien finir par tomber. 10
minutes et trois litres d'eau perdus plus tard, rien n'y fait.
Il y a bien la grande échelle dans le hall de l'immeuble, mais, comme par
hasard, elle est cadenassée. Pourtant, je l’avais utilisée une fois, avec
l'aide du voisin. J’avais grimpé jusqu'au balcon, et hop ! Ni vu ni connu, on
avait reposé l'échelle. Bref, pour avoir la clef de l'échelle, encore
fallait-il trouver le gardien. Mais aujourd’hui, c'est férié, les gardiens ne
sont pas là les jours fériés. Sur la quittance de loyer, il y a bien un numéro
d'urgence... mais la quittance de loyer est dans l'appartement. J’ appelle tous
mes potes bricoleurs, mais aucun ne possède d'échelle de plus de 4 mètres.
Justement même, ils en recherchent tous une (pour couper les arbres, poser une
antenne, remettre une tuile....). Pourtant, ces gens-là ne manquent pas d'idées
et de conseils pour ouvrir la porte comme dans les James Bond... Un copain me propose
aussi un escabeau... 1,20mètres. Sympa.
Désespérée, je décide de passer devant la loge du gardien. "On ne sait
jamais , peut-être qu'il n'a rien d'autre à faire que de venir travailler un
jour férié digne d'un dimanche de juillet".... Et là ! Miracle ! La
porte est ouverte, il fait signer un jeune couple pour un appartement. J’explique
mon cas, et là, il m’ explique que l'échelle n'arrivera pas jusqu'au deuxième
étage. Evidemment, je me retrouve comme un rond de flan à ne pas pouvoir lui
dire "bah si ! on l'a déjà fait plusieurs fois, et le voisin aussi
hein !". Le gardien prend un air malicieux et me dis "je vais
rentrer chez moi à Serris pour chercher mon TRUC". Grand silence dans la
loge, où le couple s'est pris au jeu et où le suspense n'est plus tenable. Tout
le monde s'écrit : "QUEL TRUUUC ?". Et là, pas peu fier, il nous
répond : "Une radio. Je suis le spécialiste des ouvertures de portes en
tout genre : carte d'identité, radio, carte de crédits.... Mais pour votre
porte à vous, c'est une radio qu'il faut."
Mac Giver est avec nous.
Soudain, un éclair de génie m'illumine : "Mais j'ai une radio dans ma
voiture !". Tous les regards étonnés se tournent vers moi : "vous
avez une radio dans votre voiture ?"
Oui, j'ai une radio, une radiographie médicale, pas une radio pour écouter la
musique, on est bien d'accord...
-Oui, enfin j'ai pas mal de trucs bizarres dans mon coffre, et la radio, ça
fait 6 mois qu'elle traîne dedans, c'est une radio abdominale que j'ai faite
l'hiver dernier, et l'autre jour, en allant passer l'aspirateur à la station
"Eléphant Bleu", je l'ai sortie du coffre et j'ai failli la monter à
la maison, bah oui, ça sert à rien d'avoir une radio du ventre dans sa voiture,
sauf peut-être pour montrer à la police, lors d'un contrôle d'alcoolémie, qu'on
a le foie en parfait état, pas de cirrhose en vue... Bref, je ne sais pas
pourquoi, mais j'ai décidé finalement de la laisser dans la voiture, cette
radio..."
Tout le monde est déjà sorti, en direction de la radio bénie des dieux. Nous
montons à l'appartement. Le gardien plie la radio en deux, la glisse du haut
vers le bas, et là .....
BAM ! BAM ! BAM ! il agite la radio dans un mouvement de va et
vient tout en donnant des coups de pieds tellement énormes qu'on aperçoit le
parquet de l'entrée dans l'entrebâillement à chaque coup. Je suis passée à
l'état liquide. Il va défoncer la porte ! Les voisins vont sortir, alertés par
ce bruit monstrueux qui résonne dans tous les couloirs. Mais au bout du
cinquième coup, la porte est grande ouverte, ma radio est aussi chiffonnée que
l'état de mes intestins dessus. Mais me voilà rentrée.
Coups de fil à tous les potes alertés, douche pour se remettre de ces émotions, rassurage des chats qui ont cru que c'était un cambrioleur (elles me l'ont dit), puis en voiture Simone, direction "ma soeur"...
Alors merci la bonne étoile de m'avoir fait remonter à l'appart chercher le sac
de vêtements (qui fait que j’ai évité
cette situation à 22h45), de m'avoir fait laisser cette radio dans le coffre de
la voiture, d'avoir fait que le gardien est passé une heure à la loge un jour
férié.
Merci, merci, merci !